Des questions auxquelles le Commissaire Bastarache ne répondra pas…
Radio-Canada rapportait le 26 septembre certains faits troublants concernant les trois dernières nominations à la Cour du Québec à Baie-Comeau; les trois juges avaient tous contribué à la Caisse du PLQ et provenaient du même cabinet d’Avocats.
La dernière de ces nominations étonne encore davantage: aucun des avocats qui avaient répondu à un premier appel de candidatures n’a été retenu. N’y en avait-il aucun qui soit compétent? N’y en avait-il aucun dont le Comité de sélection puisse recommander qu’il soit désigné? Est-il possible que tous les candidats à ce premier concours ait failli au test de sécurité (enquête de la SQ)? Bien peu probable!
Bref, suite à un deuxième concours, la candidature de Me François Boisjoli (dont personne ne doute par ailleurs des compétences) a été retenue et il a accédé à la magistrature en 2009.
J’avais moi-même soulevé – avant ce reportage de la SRC – un cas identique, survenu au début des années 80 sous le gouvernement Lévesque.
Le doyen de la faculté de droit, Sébastien Grammond, s’interroge. Mais, ajoute-t-il, la Commission Bastarache ne pourra ni examiner le cas Boisjoli ni surtout s’en inspirer pour faire des recommandations.
Des questions, des tas de questions auxquelles le Commissaire ne répondra pas:
Invité par Michel Lacombe à l’émission Ouvert le samedi du 25 septembre 2010, Jacques Bourgault, professeur d’administration publique à l’ÉNAP et à l’UQUàM, y a formulé une série de questions sur lesquelles il serait opportun que le Commissaire Bastarache se penche. Cette entrevue est disponible sur le site de Ouvert le samedi, 25 septembre 2010, 2e partie.
J’en ai extrait cette série de questions:
Comités de sélection / membre citoyen: celui des trois membres qui n’est ni juge ni avocat (par application du paragraphe 10c) du Règlement est-il toujours associé au financement du parti au pouvoir (comme c’était le cas de Jacques Champagne, dont j’ai déjà parlé il y a quelques jours)?
Le professeur Bourgault aimerait bien interroger la liste des membres ni juge ni avocat de tous les comités de sélection.
Juges en chef, (incluant juges en chef adjoints et associés): combien, parmi eux, ont obtenu ce statut de juge en chef après avoir fait l’objet d’une recommandation politique, comme ce fut le cas pour le juge en chef associé Simard? Il y en a eu d’autres comme lui? Est-ce qu’on pourrait savoir de qui il s’agit?
Combien de ces juges en chef (incluant juges en chef adjoints et associés) ont eux-mêmes participé au processus de nomination des juges?
Comités de sélections / membre avocat désigné par le Ministre sur recommandation du Barreau: Le ministre entérine-t-il systématiquement la recommandation du Barreau? Pourrait-on avoir accès aux recommandations du Barreau et quel est le profil des membres du Barreau retenus et non retenus par le ministre, le cas échéant?
Comités de sélection / membres substituts: Pour chacune des trois catégories (avocats, juges, et ni avocat ni juge, le Ministre peut désigner des substituts. Sont-ils nommés pour la forme seulement? Est-ce arrive qu’ils participent? Quel est le profil de ces substituts?
Juges considérés aptes à leur 2e, 3e ou 4e essai: Certains juges n’ont obtenu le poste que lors de leur deuxième ou troisième essai. Pourrait-on en voir la liste? Savoir pourquoi ils sont passés du statut de non apte au statut de apte à être nommé juge? Est-ce que ce changement de statut est imputable au candidat lui-même (exemple: il n’avait pas 10 ans de pratique à son premier essai) ou le comité de sélection en est-il responsable (par ses commentaires ou recommandations)
Nombre de candidats jugés aptes: Lorsque le Comité de sélection soumet une liste de candidats jugés aptes à la magistrature, combien cette liste peut-elle comporter de noms? Deux? Trois? Huit? Existe-t-il une statistique de ça?
Recommandations et dissidences des membres des comités de sélection: les membres des comités de sélection peuvent faire des recommandations et ils peuvent également être en désaccord sur les choix qu’ils proposent. Des membres ont-ils déjà écrit une dissidence motivée? A-t-il été tenu compte de cette opinion dissidente dans le choix fait par le ministre? Est-il fréquent que les membres des comités fassent part de leurs recommandations (négatives ou positives) au sujet d’un ou de plusieurs candidats? Le Ministre en tient-il compte?
Quelle est la portée réelle de ces recommandations? Certaines candidatures ont-elles été retenues À CAUSE DE ces recommandations? Ou MALGRÉ ces recommandations
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Le Commissaire nous dira sans doute que son mandat ne s’étend pas à ces interrogations. Ce serait dommage.
Le Doyen Grammond, tel que le rapporte Radio-Canada (lien en début d’article) commente :
« Probablement que le mandat a été formulé de façon, justement à concentrer l’attention sur Marc Bellemare, et à tenter d’empêcher le commissaire de faire une enquête générale sur les influences partisanes dans le processus de nomination des juges », avance-t-il.
Voilà comment un dépense des millions dans une Commission d’enquête, en s’assurant au préalable que les vraies questions demeureront sans réponse.
Il y en a qui appellenc ça des shows de boucane…