Ce mercredi, Richard Hétu a consacré un billet à l’occupation de la Cisjordanie par Israël, dont j’extrais le paragraphe suivant:
Après le département d’État américain, c’est aujourd’hui au tour de la page éditoriale du New York Times d’exhorter le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu de ne pas suivre les recommandations «désastreuses» d’un comité présidé par l’ancien juge de la Cour suprême Edmund Lévy selon lesquelles les colonies sauvages en Cisjordanie devraient être légalisées.
Comme il fallait s’y attendre, l’honORIFICEntissimus [honorablissime, en latin] Monsieur Jourdain, M.Phil, Ph.D. n’apas tardé à se porter à la défense du valeureux État hébreu. C’est ainsi qu’il écrivait, à 11h58, ce 11 juillet:
“colonies sauvages en Cisjordanie”: du jargon gauchiste et biaisé pour décrire des implantations non autorisées en Judée-Samarie.
Heureusement, le NY Times est moins biaisé, puisqu’il nous parle de “unauthorised settlements in the West Bank”. Aucune allusion à des “colonies”, aucun mot insultant du type “sauvage”, et aucune allusion à la Jordanie.
Dans l’esprit particulièrement tourmenté de cet éminent penseur, le terme CISJORDANIE – auquel il préfère celui de Judée-Samarie, réfère à la Jordanie. Le terme ne peut donc appartenir qu’à la seule mouvance gauchiste, alors que au contraire, l’expression Judée-Samarie – tirée des livres saints du christianisme et du judaïsme, serait plus « moderne », plus neutre et moins chargée émotivement.
Ridicule! De la part du fier détenteur d’un Doctorat, parfaitement bilingue par surcroît, on peut s’attendre à ce qu’il sache que West Bank et Cisjordanie sont l’un le miroir sémantique de l’autre.
On réfère ici au « Jourdain » – connu en anglais sous le nom de « Jordan River », auquel la Jordanie doit son nom… un peu comme la région de l’Outaouais doit son nom à la rivière des Outaouais – Ottawa River.
Le préfixe CIS, en latin, signifie: de l’autre côté, au delà de…. Le terme CISJORDANIE n’a donc aucune connotation politique; il ne réfère pas au pays connu sous le nom de Jordanie mais plutôt à un lieu, défini géographiquement comme étant situé au delà du Jourdain. Au delà du Jourdain, du moins pour ceux qui habitent de l’autre côté…
En anglais, on dit West Bank – littéralement, « rive occidentale ». On aurait pu dire « Jordan River’s West Bank » – rive occidentale du Jourdain, ce qui correspond tout à fait à l’idée que traduit finalement le mot Cisjordanie. Si bien que Cisjordanie et WestBank sont deux synonymes, quoi qu’en dise l’honorable Monsieur Jourdain, à qui Molière a omis de lui faire donner des leçons de sémantique.
Haro sur les colonies juives; parlons plutôt d’implantations, ma mère!
Monsieur Jourdan s’insurge également contre l’expression « colonies juives », en raison de sa connotation « colonialiste ». IMPLANTATIONS lui semblerait préférable.
L’économie de la langue voudrait que l’on parle plutôt d’ÉTABLISSEMENTS. Je rappelle à ce moliéresque personnage – dont on dit qu’il enseignerat la médecine – qu’un implant mammaire, c’est l’introduction d’un corps étranger sous l’épiderme de la femme, un peu comme les « implantations israéliennes » sont l’introduction d’étrangers au milieu d’une population qui manifeste des signes de rejet évidents.
S’il dit que ça lui convient, c’est qu’il n’a pas vraiment compris…
Enfin, je suggère à Monsieur Jourdain de rechercher sur l’excellent site LINGUEE la traduction que donnent de l’expression « Israeli settlements » diverses sources qui publient aussi bien en anglais qu’en français. Il en ressortira pantois; presque invariablement, en effet, l’expression est traduite par « colonies juives« … J’aime bien la formule adoptée par Linguee; plutôt que d’énumérer des mots, Linguee énumère des phrases, ce qui permet d’apprécier le contexte et d’en arriver à une compréhension plus juste.
Et, Israël n’a jamais implanté des colonies, mais bien des maisons!!!, hurlera un autre ici-même, en ces pages.
Combien il en faut, papa, des maisons, pour qu’on puisse appeler ça une colonie, demanda le Petit Prince? Comme St-Exupéry n’avait pas entendu la question, elle demeura sans réponse. Mais le vent l’a soufflée jusqu’en Abitibi, où j’ai pu la recueillir. Pour le cas où il vivrait encore, je fais donc au Petit Prince la réponse qu’autrefois le sphinx m’avait apprise: et à toi, Petit Prince, combien il te faut de doigts pour que tu puisses tenir la rose à la main?
Une main, ce sont des doigts rassemblés en colonie autour d’une paume.
Les sauvages
L’homme en a également contre la juxtaposition des termes « colonies » et « sauvages« . Je conviens sans peine que le terme « sauvage » peut suggérer une image négative. Comme dans « battu sauvagement« . Mais le terme n’est pas péjoratif en soi: plus elle est sauvage, et plus la nature est belle. Le chevreuil est une bête sauvage; sauvage, dans le sens de farouche, non apprivoisée. Magnifique, mais pas très « sauvage », dans le sens de féroce, comme l’entend plutôt Monsieur Jourdain!
Un commentateur, Lukos, a commis cette phrase lapidaire (à 18h01): Implantations non autorisées, un euphémisme pour occupation sauvage. C’est la manière baveuse de dire les choses; si le terme « sauvage » devait être pris dans le sens très négatif que suggère Honorable, alors ce Lukos serait parfaitement justifié de dire les choses comme il les dit.
Mais moi, je vois les choses autrement.
En effet, en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire, le terme « sauvage » a un sens beaucoup plus neutre: spontané, subit, non planifié, anarchique… Lorsque les urbanistes dénoncent le développement sauvage d’une ville qui n’aura pas su préserver les traces de son histoire ou certains édifices à valeur patrimoniale élevée, ils ne suggèrent pas que les promoteurs ont massacré SAUVAGEMENT les propriétaires de ces joyaux du patrimoine dans le but de s’accaparer de leurs immeubles. Ils suggèrent simplement que les autorités ont peut-être fait preuve de laxisme et que peut-être elles auraient dû intervenir et mettre un peu d’ordre.
Tout comme la communauté internationale a cru nécessaire de condamner le gouvernement israélien pour avoir ou bien autorisé spécifiquement, ou bien fermé les yeux sur les établissements (1) juifs spontanés (2) en territoire disputé (3). Ça va comme ça? Je me suis vraiment fendu en quatre pour trouver trois termes qui ne seraient susceptibles de heurter la sensibilité ni d’un Juif, ni d’un Palestinen.
Ah, mais j’oubliais: le peuple palestinien a été inventé, disent les uns, alors qu’aux yeux des autres, c’est le peuple juif qui n’a jamais existé! De nouveau, c’est l’impasse!
Et… vous en pensez quoi?
Qu’une colonie est composée de maisons habitées par des colons.
Et que par la merde qu’ils diffusent régulièrement de la Tatagnochonistan, ces colons souffrent vraisemblablement de la maladie du colon rectal.
Avez-vous entendus parler du ‘malaise’ que B’nai Britnai a eu avec la pièce de Juste pour Rire, le Prénom?
Et il est bon de se rappeller que parmis les ancètres des palestiniens, il y a… des juifs. Qui sont resté en Palestine.