B’nai Brith Canada condamne vigoureusement tout geste, comportement ou commentaire susceptible de porter atteinte à la mémoire des victimes de l’holocauste; je puis l’assurer, en cela, de mon soutien total et indéfectible. D’autant plus que de proches parents de ma conjointe ont compté parmi les victimes.
Je comprends par ailleurs que le salut nazi puisse être interdit en Allemagne et en Autriche, où il est associé au bruit des bottes qui battaient le pavé dans un passé encore chaud, et où on l’associe également à des groupuscules de suprémacistes néo-nazis. Je saurais gré à la communauté juive, toutefois, de bien vouloir comprendre que même salut n’a pas au Québec la même connotation: s’il rappelle chez nous les horreurs du nazisme, ce n’est pas pour en faire la promotion, mais pour s’en dissocier et les dénoncer. Ce pourquoi, d’ailleurs, il n’a pas été interdit en ce pays.
«Nous condamnons vivement cet inexcusable étalage de haine lors des manifestations étudiantes au Québec qui a scandalisé la communauté juive et montre à quel point le débat public dans les rues de Montréal est tombé bas», a déclaré le chef de la direction du groupe, Frank Dimant, dans le communiqué [note de l’auteur: communiqué émis le 12 juin 2012 par le B’nai Brith].
«Les gestes des manifestants, qu’ils visent à insulter la police ou à attirer l’attention sur leur cause, constituent une injure à la mémoire des victimes de l’Holocauste …
Désolé, mais dans le contexte du Québec de 2012 et de son printemps érable, le salut nazi avait une toute connotation; je salue néanmoins l’appel de la CLASSÉ à la fin de cette pratique. C’était, à mon sens, témoigner d’un immense respect envers la communauté juive. Respect mérité, par ailleurs; ce qui ne m’empêche pas d’affirmer que le salut nazi, dans le contexte du printemps érable en 2012, ne constitue pas une injure à la mémoire des victimes de la Shoah, mais plutôt, une injure aux forces policières. Injures bien méritées, si je puis me permettre cet aparté.
« …Qui a scandalisé la communauté juive… »
Hummm. J’ai souvenance d’une époque, pas si lointaine, où la méthode d’abattage cachère aurait scandalisé des milliers de Québécois, s’ils en avaient été informés. Idem, bien sûr, pour l’abattage halal. Sauf que dans les années 50, les mouslimes à voile, à barbe ou à vapeur étaient si peu nombreux que… who cares?
Et il y a aussi cette ablation des jeunes prépuces… Me voilà – et c’est bien le cas de le dire – dans le vif du sujet de ce billet. Là aussi, il y avait matière à scandaliser les occupants des chaumière, peu habitués à ces méthodes « barbares » importées de la Terre Sainte et de ses banlieues moyen-orientales, maghrébines ou est-européennes.
Alors si on devait interdire toutes ces choses qui scandalisent les membres d’une autre communauté, est-ce qu’il ne faudrait pas interdire les religions? Ça serait un bon début. Ceci dit avec une hénaurme pointe d’ironie, m’empresse-je d’ajouter; après tout, les races ethniques et les autres rastaquouères, c’est susceptible en tabarnak, quand ça veut!
Dans un billet au titre incisif (!) – Saisi de l’affaire, un juge a tranché (!) – j’avais abordé abordé avec un peu d’humour et beaucoup de sérieux la délicate question de la circoncision à des fins religieuses. Juifs et musulmans réunis autour d’un même prépuce, promu au rang de l’arme ultime de pacification massive entre frères zen, autrefois zennemis.
Mais voilà que le président de la Conférence des rabbins européens revient à la charge et rajoute une couche sur le gland (!). Avec cette citation un peu bizounée (!) – mais si peu – que j’ai reproduite sur cette excellente photo-caricature qui coiffe ce billet.
C’est donc de cela que j’entend vous entretenir. Trêve de plésentheries, doncques [1], et place à la discussion.
Apocalypse Now, version du Grand Rabbin
Avant de citer au texte le Grand Rabbin Pinchas Goldschmidt, un homme de savoir et de culture, je prends la liberté de rappeler, comme ça et sans la moindre arrière-pensée, que la communauté juive a toujours plaidé en faveur du caractère quasi sacré [2] de l’Holocauste, dont il y a lieu de se souvenir comme de l’horreur suprême, à nulle autre comparable. La Bête, qui se sera échappée du cerveau tordu d’un Autrichien à moustache et qui doit conserver son caractère unique, incomparable à nulle autre plaie. Rien ne saurait être comparé à l’Holocauste, en nombre et en intensité.
Cela dit, la Shoah n’était pas la première manoeuvre d’épuration ethnique et – malheureusement – elle n’aura pas été la dernière. Pour les fins de la discussion, conservons-lui son caractère de souffrance absolue.
Qu’a-t-il donc dit, le Grand Rabbin de Moscou?
Dans son édition du 14 juillet 2012, le quotidien britannique The Independant [3] en rapporte les propos [traduction]:
Hier, des leaders juifs européens ont vertement critiqué la décision d’un Tribunal allemand d’interdire la pratique de la circoncision [4], la qualifiant de « pire attaque contre les Juifs depuis l’Holocauste« , et ils ont exigé que le gouvernement de la chancelière Angela Merkel intervienne afin d’assurer la pérennité de ce rituel religieux.
Depuis les communautés juives et musulmanes d’Europe fusent de plus en plus de commentaires indignés face à cette décision rendue le mois dernier par une Cour de Cologne à l’effet que parce qu’elle enfreint leur droit à l’intégrité de leur propre corps et leur cause des lésions corporelles, la circoncision des jeunes garçons pourrait être considérée comme une infraction criminelle.
L’auteur de ce commentaire sur l’Holocauste, Pinchas Goldschmidt, Grand rabbin de Moscou et président de la Conférence des rabbins européens , a ajouté: «Si ce jugement devait devenir final et sans appel, je n’entrevois aucun avenir pour les Juifs en Allemagne« .
Un sondage révèle que la majorité d es Allemands approuve cette décision du Tribunal, qu’aussi bien les organismes juifs que musulmans [5] considèrent comme un affront à leur liberté de religion. Depuis ce jugement, les médecins hésitent à – ou refusent de – pratiquer l’intervention, mais le leader parlementaire des Verts d’Allemagne, Renate Künast, a confirmé qu’il favorise une libéralisation du droit à la circoncision pour des motifs religieux.
Je termine ici ce billet, après avoir pris la décision de le scinder. À suivre, donc, avec encore un complément d’information… sous un angle plutôt inattendu, et avec des pistes susceptibles d’inspirer une profonde réflexion!
Prière de commenter sous le second billet. Merci.
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[1] Donc… sous une forme que seuls les très très très moins jeunes et les très érudits auront reconnue.
[2] J’ai utilisé l’expression « caractère sacré », faute d’avoir trouvé mieux. J’entends par là que l’Holocauste, ça ne doit et ça ne peut, dans l’histoire d’un peuple, survenir qu’une seule fois, et c’est bien sûr une fois de trop.
[3] The Independant est politiquement de gauche mais plus à droite sur les questions d’ordre économique.
[4] Précision importante: la circoncision pour un motif médical n’est pas touchée; c’est la circoncision à des fins strictement religieuses qui est visée par le jugement rendu à Cologne.
[5] La requête adressée au gouvernement porte la signature des représentants du European Jewish Parliament, du Rabbinical Centre of Europe, de la European Jewish Association, de la Germany’s Islamic Union for religious Affairs et du Centre Islamique de Bruxelles.
[6] J’avais expliqué dans mon billet du 1 juillet dernier qu’il est peu probable que la décision soit portée en appel; les organisations juives et musulmanes ne disposent pas du droit de porter le dossier en appel, puisqu’elles n’étaient pas des parties au litige. Pourraient-elles financer l’appel devant le Tribunal l’Oberlandesgerichte – l’équivalent de la Cour d’appel du Québec, et si nécessaire devant l’instance suprême que constitue la cour fédérale de justice (Bundesgerichtshof)? Je ne sais pas. Par contre, Angela Merel a une patate chaude dans les mains: l’interdiction de l’excision. Et l’interdiction des interventions cosmétiques sur les animaux de compagnie.
Il y a un revers à toute médaille: ici, la liberté de religion et le droit de l’enfant de ne pas être mutilé constituent deux droits mutuellement exclusifs. Alors que fera Merkel? Quels droits auront préséance?
Comment le gouvernement pourra-t-il faire accepter par la population (largement favorable à l’interdiction) que les droits des filles soient mieux protégés – par la Loi – que ceux des garçons? Et comment convaincre la population que les droits d’un animal de compagnie soient plus étendus et mieux protégés que les droits d’un bébé garçon?