Les chefs, cheftaine et co-cheftaine se sont retirés pour préparer leur sauce et disposer les plats où ils comptent voir leurs adversaires se mettre les deux pieds. Déjà, résonne le son des casseroles, amplifié par les haut-parleurs du populisme.
En guise d’amuse-ghoules, le clown Là-Là a présenté son célèbre aspic à la chair de mousselime. Un pur délice pour les chauves-souriants et autres vampires!
Ça ne semble pas aller très bien pour ces Libéraux souvent ben plus à gauche que leur Cheuf, un hybride de Jean Lesage et de Maurice Duplessis. Quand j’ai commencé à turluter les mots du présent billet, je voulais parler de la [re] naissance prochaine du NPD-Québec, qui pourrait bien remplacer bientôt le PLQ dans le coeur des fédéralistes de gauche. De gauche? Oui, de gauche. Ceux qui, par dépit et faute de mieux, votent Libéral. J’allais écrire que si Jean Charest ne parvient pas à se relever, son parti pourrait bien être KO, et son sang être bu par Thomas Mulcair. Douce vengeance en perspective…
J’y reviendrai. Surtout si Jean Charest devait sous-performer dans les débats, ou pire (ou mieux encore, c’est selon), s’il devait s’effondrer.
Pour l’instant, parlons plutôt de cette panique qui semble avoir corrodé le cerveau de plusieurs libéraux.
Panic! Panic! Panic!
Les sondages? On ne regarde jamais ça! N’empêche que, rien qu’à voir les mimiques du Libéral Henri-François Vautrin (réélu sans interruption dans Verdun depuis 1989), on sent que les sondages internes du Parti Libérule indiquent que le puck roule pour une autre équipe. N’empêche que, rien qu’à voir le ministre Serge Simard saluer le courage de Là-Là Tremblay dans ses attaques xénophobes contre cette Algérienne-au-nom-pas-prononçable, on sent que les Libérules en sont à gratter leurs fonds de tiroir terroir.
François Legault et Pauline Marois ont demandé à M. Tremblay de s’excuser. Or le ministre Serge Simard, candidat dans Dubuc, et Carol Néron, candidat dans Chicoutimi, ont soutenu que le maire de Saguenay ne devait pas s’excuser puisque ses propos « reflètent tout ce que les Québécois pensent ». – Le Devoir, 17 août
Jeudi, le candidat du PLQ dans Chicoutimi, Carol Néron, est venu à la rescousse du maire Tremblay. « Je ne crois pas qu’il devrait s’excuser, a-t-il déclaré à TVA Nouvelles. Il a dévoilé le fond de sa pensée. C’est dans sa personnalité, c’est dans sa nature et il ne faut pas oublier que ça reflète tout ce que les Québécois pensent.» M. Néron est un personnage bien connu dans la région, où il a occupé pendant près de 20 ans le poste d’éditorialiste au journal Le Quotidien. – Patrick Bellerose, Huff Post, 16 août
«C’est pas moi qui tient ces propos là mais […] Il [Jean Tremblay] ne manque aucune occasion de faire valoir ses idées et je pense qu’il a vraiment un courage que pas beaucoup de monde a, honnêtement» – Serge Simard, s’exprimant en conférence de presse (clip diffusé par Radio-Canada le 16 août 2012
Charest refuse de condamner de manière explicite les propos de Là-Là Tremblay? À la rigueur, je pourrais (presque) être tenté de l’en excuser, dans la mesure où Là-Là ne joue pas dans la même ligue que lui. Encore que cette tiédeur lui avait sans doute été commandée par une lâcheté toute électorale – la crainte de heurter cette partie de sa base qui loge à Hérouxville. Il s’était donc contenté d’affirmer que nos valeurs libérales, ce sont des valeurs d’ouverture. Que – ou qui – voulait-il alors condamner? Le fondamentalisme chrétien de Là-Là, ou le fondamentalisme laïque de Benhabib?
Valait mieux pour lui qu’il entoure sa déclaration d’un flou artistique: tout le monde y trouvera son compte, a-t-il dû conclure.
Mais que Jean Charest refuse de condamner son ministre Serge Simard pour son appui à Là-Là, là, là, moé je marche pu! Néron, passe encore; il n’est pas ni ne sera sans doute jamais ministre. Mais Serge Simard? Le Cabinet parle d’une seule voix, nous avait Charest pendant la crise étudiante; ce doit être encore vrai, non? Simard a pris la peine d’affirmer que ces propos ne sont pas les siens, avant de les endosser. C’est donc l’ensemble du Cabinet qu’engage le fou-à-Simard dans cette dérape xénophobe. Et Jean Charest se tait, confirmant ainsi le caractère xénophobe du Cabinet des ministres. Tabarnak!
Les sondages
Ça r’garde mal pour Serge Simard, nous dit Segma Recherche, après un sondage réalisé auprès de 600 électeurs de sa circonscription, entre le 13 et le 15 août. Les propos du ministre sonnent comme si lui-même avait cherché à racler les fonds de terroir en se collant aux propos de Là-Là, un politicien populiste et populaire, là, là. OK, 42% des sondés pourraient encore changer d’avis, disent-ils… mais ça, c’est rarement bon signe pour le députant sortant d’un parti usé par 9 ans de pouvoir et des soupçons de corruption institutionnalisée. Simard ne rallierait plus que 32% des électeurs, contre 44% pour son adversaire péquiste. Ça r’garde mal pour le Parti Libérule as a whole.
Les sondages dits nationaux se succèdent et se corroborent les uns les autres: l’appui des francophones diminue sans cesse, et la CAQ de François J’voterais-NON Legault commence à engranger chez les Anglophones. Est-ce là le résultat de l’appel lancé il y a une dizaine de jours par Robert Libman, le fondateur de l’éphémère?
L’homme qui a mené la dernière révolte anglophone contre les libéraux québécois affirme qu’il est à nouveau temps pour cette minorité de repenser ses options électorales et d’envisager de voter pour un autre nouveau parti: la Coalition avenir Québec (CAQ). – Jonathan Montpetit, la Presse Canadienne, 8 août 2012
Et puis, il y a ces appels aux Anglos et allophones: « ne pas voter, c’est voter pour Marois, c’est voter pour un référendum. »
Ça sent la panique!
La preuve? Les Libérules ont lancé un « jumeau » au site Libéraux.net, particulièrement dévastateur. À mon avis, ils ont réagi trop tard; le mal était déjà fait.
Libéraux.net
Soutenant que le site liberaux.net constitue « la plus vaste opération anonyme de salissage sur le web » à son égard, le Parti libéral du Québec a lancé pourlaverite.net, qui reprend « plus de 90 aberrations, scandales, tromperies et mensonges » et les transforme en « plus de 90 vérités, faits, informations et rectifications » sur lesquelles l’équipe de recherche du PLQ s’est penchée. Qu’en est-il vraiment? Quelques affirmations des trois premiers points abordés sous la loupe de Radio-Canada… – Radio-Canada, 16 août, via le Huff Post
Ils ne parviennent pas à convaincre; la réponse des VRAIS Libéraux au site LIBÉRAUX.net semble avoir été improvisée et conçue en toute hâte, comme s’ils avaient été convaincus que le DGE allait en ordonner la fermeture. Comme s’ils avaient été convaincus qu’il était inutile de prévoir une riposte.
De toute évidence, quelqu’un aura péché par excès de confiance. De toute évidence, les hautes instances avaient prévu que le chaos règnerait pendant la campagne, et que – corollaire obligé – Jean Charest pourrait y associer avec succès la dame au carré rouge. De toute évidence, les hautes instances avaient sous-estimé la CAQ, et l’ampleur de sa razzia au sein de l’électorat traditionnellement acquis aux Libéraux. De toute évidence, le crédo néo-fédéraste de François Legault n’avait pas été prévu. Ni les grosses prises de la CAQ en cours de campagne.
De toute évidence, les hautes instances n’ont pas su interpréter l’incapacité du Parti Libéral de recruter des grosses pointures. Robert Poëti, ça ne suffira pas. Ni l’ancien bâtonnier Ouimet, dont le recrutement est passé dans le beurre.
Le PLQ croule sous le poids de sa propre arrogance.
Charest réussira-t-il, par ses talents de débatteur, à remettre la machine en marche? Ou le NPD-Québec dont la naissance est annoncée pourra-t-il se repaître de sa carcasse?
La survie du PLQ me semble tenir – pour partie – à la performance, ou à la mal-performance de Jean Charest. Surtout si le NPD-Q devait venir lui souffler une partie de son patrimoine et repartir la machine avec une image plus propre.