C’est pas parce qu’un texte a du poil au menton qu’il cesse d’être d’actualité.
Après l’élection du Parti Québécois par la peau des dents, ce courriel de David « né à Jérusalem » Ouellette mérite d’être cité de nouveau, en guise d’apéro.
ICI, donc… et en presque-bas de page.
Oui, il y a des judéophobes au Québec et oui, certains d’entre eux sont des petites andouilles souverainistes. Que Ouellette puisse prétendre expliquer ainsi l’aversion de la communauté juive à l’égard de l’indépendance du Québec, ça me dépasse. L’indépendance du Québec n’est dirigée ni contre le Canada ni contre la communauté juive. Les Israéliens ne cessent d’affirmer que l’indépendance d’Israël n’était dirigée ni contre les Arabes, ni contre les Palestiniens, ni contre la grande-Bretagne; ils plaident que, à cause de leur spécificité, les Juifs y avaient droit. Et je suis d’accord.
Ce qu’ils ont obtenu pour eux-mêmes, pourquoi me refusent-ils à moi de l’obtenir à mon tour? Parce qu’ils craignent qu’un Québec souverain ne mette fin à la certification cachère des eaux embouteillées, des croustilles et des cannes de tomates en dés?
Pourquoi la communauté juive ne dénonce-t-elle pas avec la même vigueur tous ces Rest of Canadians anglophones qui sévissent au royaume des orangistes et autres WASPS intolérants – pourtant proportionnellement au moins aussi nombreux que les séparatisses intolérants? La judéophobie n’est pas propre au Québec; le mal est répandu, et je crains qu’il ne se répande davantage. Pour les motifs exprimés plus bas…
Toronto, c’est au Québec?
Le Centre pour Israël et les Affaires Juives (The Centre for Israel and Jewish Affairs), une organisation parapluie pour les mouvements juifs canadiens, vient de publier sur internet une vidéo de plusieurs minutes montrant les images de la journée de Jérusalem (Al Quods) dans le Parc de la Reine de Toronto il y a quelques jours. Au cours de l’évènement, les conférenciers ont décrit l’État Juif comme un cancer qui doit être exterminé. Israël est, selon les manifestants, présent partout où une injustice se commet, les habitants d’Israël sont tous (ndlr: au moins les Juifs) des « racistes », des « barbares »… En fait, ils sont « inhumains ». Lors de cette manifestation, des drapeaux de l’organisation humanitaire -sic- Hezbollah ont été déployés. Après tout, quoi de plus humanitaire que de vouloir exterminer les Juifs ?– JSS News, 8 septembre 2011
Ces manifestants, à Toronto, étaient-ils de sales québécois souverainistes? Non. Pourquoi David Ouellette n’a-il pas alors publié kek chose comme « C’est à cause de petites andouilles de votre espèce que les Juifs se rallieront à un Québec souverain »? Je dis ça de même, là, là…
Liberté de dire ce qu’il est douloureux d’entendre…
Le blogue de Ouellette comporte en exergue cette citation de George Orwell: Parler de liberté n’a de sens qu’à condition que ce soit la liberté de dire aux gens ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre…
Je prends donc pour acquis que ce bon David acceptera que je ressuscite ce texte – qui n’est pas de moi – et qui est aussi ancien que ce courriel qu’il avait transmis le 8 juin 2004. La liberté d’expression – façon David Ouellette/George Orwell, c’est aussi la liberté de dire à certains Juifs, réels ou auto-proclamés, certaines vérités qu’ils n’ont pas l’intelligence de vouloir entendre.
J’ai maintes fois exprimé, ici et ailleurs, mes réticences à l’égard de Vigile.net. Ce qui ne veut pas dire que tout ce qu’on y publie est sale. Je cite, donc:
Je tiens le racisme pour une forme de déficience intellectuelle.
[note de l’auteur: je dirais plutôt que, règle générale, c’est le résultat d’une crainte viscérale qui résulte elle-même d’une profonde méconnaissance de l’autre et souvent, d’un refus pathologique de l’altérité]
Sauf que.
[…] si on ne fera jamais de moi une raciste […], les représentants les plus visibles de la communauté juive sont décidément en bonne voie, à tout le moins, de me transformer en parfaite indifférente à leur sort.
Et je le déplore, croyez-m’en, avec une tristesse non dissimulée.
Je suis consternée, jour après jour, semaine après semaine, année après année – Ouf ! – de constater que l’un des plus grands ennemis de la communauté hébraïque – peut-être même le plus féroce de tous – réside au sein des plus tenaces «défenseurs» de celle-ci. Ainsi, non seulement par cette attitude vous alimentez vos adversaires véritables, le cas échéant, mais vous parvenez à merveille à rebuter définitivement vos camarades, vos amis, vos alliés, vos frères enfin. Dont je suis.
Dont je fus…?
[note de l’auteur: pour ma part, je n’en suis pas encore au « Dont je fus…? ». Mais tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse; j’ai beau répéter les pires insultes contre l’un ou l’autre des leaders arabo-irano-musulmans past and present, seuls Jacques Noël (bien connu à Québec) dans les pages de feu Vastel et UN commentateur – CBYOL – sous l’un de mes propres billets – me perçoivent ou m’ont perçu comme un suppôt de Sion. Cybol disait de moi: « D’autre part, vous défendez les juifs sur un ton plutôt agressif, voir haineux. bel exemple ! » [1]
Et UN musulman m’a déjà qualifié d’islamophobe. Un seul, de mémoire. Et c’est Mozart, sur le blogue de Richard Hétu. Faut-il en conclure que les Arabo-Irano-Musulmans sont moins susceptibles?]
Contre la souffrance, et notamment celle des vôtres en propre dans le passé […], la communauté juive ne semble plus savoir opposer autre chose que la conviction intime du: «J’ai la raison absolue pour moi!» (ce qui au demeurant est plus près de la Sainte Inquisition que de Hegel). Autre chose hormis… l’armada hypersophistiquée d’Israël, bien sûr, mais que je ne discuterai pas ici (autre pan de l’histoire au reste qui ne saurait se voir traité du revers de la main par reconduction simpliste de la phraséologie habituelle de propagande. C’est trop sérieux, trop douloureux).
[note de l’auteur: voilà justement qui rejoint l’actualité la plus… actuelle, alors qu’un fragile cessez-le-feu subsiste entre Israël et le Hamas.]
Bref, l’ennemi premier des ténors d’Israël et de la diaspora, le plus funeste de tous à vrai dire (parce qu’il les triture de l’intérieur dans leur conscience même), c’est la mauvaise foi. Flanquée en outre d’un prodigieux déficit d’humilité. Autant de nourritures fort riches en protéines pour tous les conflits réels ou possibles entre les hommes de toutes les nations.
C’est de la sorte, de monologues de sourds en spirale de la violence, qu’on ne va plus nulle part. Sinon à la mort – violente, déchirante, déchiqueteuse. Arabes et Juifs confondus comme frères et soeurs – car enfin, tous sont sémites (ou descendants de Sem, l’aîné des trois fils de Noé selon la légende) – dans la même fosse commune de l’Histoire.Il me semble qu’un peu d’intelligence vous éviterait de vous tirer ainsi, et continuellement, dans le pied à coup de battage et de bourrage – «Nous sommes le bien, l’Autre est le mal» (encore du mauvais Hegel…?) – qui ne convainc ni ne trompe plus personne. Mais voilà hélas! un appel à la réflexion qui manifestement ne rejoint pas à ce jour une oreille bien réceptive. Sauf que ça commence sérieusement, dangereusement aussi, à ressembler à de la delectatio morosa – ou jouissance de la victimisation.
Ne trouvez-vous pas…?
Laure Gardenelle,
Une goya québécoise,
28 juillet 2004
Sous les quelques réserves exprimées plus haut, et sauf à l’égard de cette delectatio dolorosa, je partage cet avis. Sa supériorité militaire ne suffira pas à assurer la survie d’Israël. Les imbéciles y verront l’expression d’un souhait; oh, que non! J’ai tremblé pour mes amis de Tel Aviv et je m’inquiète du « backlash » dont toutes les communautés juives pourraient être les victimes en occident.
Je m’inquiète également de l’effritement des appuis à Israël, même parmi ses alliés d’autrefois. Ça vaut pour les nations [la Turquie d’Erdogan, par exemple], mais ça vaut aussi pour tous ces goyim – auxquels j’appartiens – dont la tolérance à l’égard de l’intolérance des Juifs à la critique d’Israël est mise à rude épreuve par le caractère trop souvent farfelu de toutes ces accusations d’antisémitisme.
Puisque Madame Gardenelle se décrit comme une Goy femelle, je crois utile de rappeler également le contenu de cette note, en bas de page de son texte: Le Goy : le « non-juif » (en yiddish) ! Non mais… imagine-t-on un instant le tapage à travers le Canada si les Québécois, par exemple, «divisaient» le monde (que dis-je: l’univers!) entre «eux» et les «non»-Québécois… Un peuple de racistes, et d’antisémites au premier chef, voire de fascistes, assurément, que ces «Français d’Amérique». On s’en doutait bien un peu, hein…
Il en faut beaucoup moins que ça pour autoriser le lectorat habituel du National Post à qualifier les Québécois – dans leur ensemble – de sales racistes et de nazis… Je disais ça de même.,
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[1] Plus loin dans la discussion, le même CBYol parle des Juifs comme de mes petits amis en Israël. Au moins, lui, il ne va pas jusqu’à m’assimiler aux extrémistes sionistes qui avaient incendié la résidence du White Supremacist et négationniste (de la Shoah) Ernst Zündel à Toronto, comme l’avait fait Jacques Noël en 2008 ou 2009.