L’article « des barrières qui dérangent » est réservé aux membres VIP. Voilà un Hournal qui a de la classe: c’est pas les hournaux-à-Démarrah ni encore moins l’insignifiant Dewouère qui oseraient considérer leurs abonnés comme des Very Importantes Personnes!
L’article, mis en ligne samedi le 17 août sous la plume de Mélanie Bergeron, n’a rien d’offensant, quoique subtilement biaisé: « Une clôture temporaire qui ne s’étend que sur quelques mètres a été installée [NDLR: le 22 juillet 2013] devant le centre islamique Badr, situé sur le boulevard Langelier ». Sur quelques mètres seulement? C’est pas ce que nous apprend la photo qui coiffe l’article; j’ai apporté à l’image quelques ajouts, dont un plan en surimpression et que
Le SPVM en a fait la recommandation en raison du grand nombre de piétons qui traversent entre deux intersections vers le Centre islamique Badr; ils seraient près de 500 à contrevenir ainsi au règlement, tous les vendredis, entre 11h30 et 15h.
Abordé par le Journal quelques minutes avant sa prière, Hamaïdi Mohammed pense que cette «barrière de confrontation» est une honte pour toute la communauté musulmane. […] Fouad Missoum, musulman pratiquant, estime quant à lui que ces clôtures rendront les déplacements plus sécuritaires.
L’article n’en fait pas mention mais la distance que doivent parcourir les piétons fait partie de l’équation. La distance entre les intersections Bombardier et Paul-Émile Lamarche est d’environ 300 mètres – 1000 pieds (mesuré à l’oeil sur Google Maps). De l’intersection P-E Lamarche au Centre islamique, il y a 90 mètres. Et un peu moins de 60 mètres de la mosquée à l’intersection Belherbe. Bref, dans les circonstances et compte tenu de cet achalandage, n’y aurait-il pas lieu de songer à aménager un passage pour piétons?
Et en attendant? Je partage l’opinion des lecteurs du Hournal qui estime que les contrevenants méritent une contravention. Mais bon, peut-être le SPVM devrait-il alors sévir contre tous les Juifs qui stationnent en double devant ou à proximité d’une synagogue? Et contre tous les piétons qui traversent entre deux intersections sur la Plaza St-Hubert ou qui traversent la rue Crescent sur un feu rouge, angle Ste-Catherine?
Je disais ça d’même, moi qui suis moi-même contrevenant depuis 50 ans, minimum! Hi-Ha…
« Des clôtures en harmonie avec le grillage au visage de leurs femmes »…
Là où le Hournal fait preuve de la plus abjecte infamie, c’est quand il tolère ce genre de commentaires qui incitent à une islamophobie haineuse et contreviennent ainsi aux articles 318 et suivants du Code criminel:
- S’ils ne sont pas capables de comprendre des mesures simples de sécurité, qu’ils retournent d’où ils viennent. – Alsen
- Le seul endroit ou l’on devrait vraiment installer un clôture, ce serait à la frontière pour empêcher ce genre d’indésirable d’entrer au pays. – L’enragé
- Encore un autre problème avec les musulmans. Il ne se passe pas une semaine sans qu’il y ait des problèmes avec cette gang-là. J’espère que l’Immigration se rend compte des bêtises qu’elle commet chaque fois qu’elle en accepte un. C’est toujours un de trop. – Saintparatisse
- Le problème c’est qu’ils ne veulent pas s’intégrer et on leur permet de vivre en ghetto. – Daniel G2
[NDLR: Si le fait d’assister à un office religieux est devenu un problème, qu’on transforme TOUTES les églises et tous les temples protestants en condos!]
- Que ces plaignards respectent nos lois. Fini les accomodements. Nous on en a jamais demandé et on est pas morts.. – Claude Choquette
- Moi,ce n est pas les barrières qui me dérangent!!!!!!!!!! – phil37
- un seul commentaire ENCORE les musulmans.. – Momo39
- Personne ne les retiens,je suis même prêt à contribuer à l’achat de billets d’avion et BYE BYE…. – Aubaineetplus
- Un billet d’avion pourrait les amener dans des pays où il y en a plein de mosquées non clôturées. Ils s’y sentiraient comme chez-eux et pourraient s’y épanouir dans un endroit non dégradant ou déshonorant.
Et pour diminuer les coûts, un billet ‘aller-simple’ serait préférable… – MrToutlemonde - C’est pour aller en harmonie avec le grillage que leurs femmes doivent avoir au visage. – GuillaumeDurand
- Une barrière pour le bétail? quand on se comporte comme un troupeau on gère un troupeau – Michell 50657
- Pourquoi c’est toujours les barbus qui chialent. Et pas juste à Montréal c’est mondial le problème. – Jean B12345
Publier, tolérer ou négliger de vidanger de tels commentaires, c’est criminel. Period! En ouvrant à Pierre-Karl Péladeau les portes du C.A. d’Hydro-Québec, Pauline Marois a lancé un message dont manifestement elle n’avait pas mesuré toute la portée: Mossieu Pierre-Karl avait soustrait l’ensemble des médias Québecor au contrôle du Conseil de presse, cette police édentée soit-disant garante de l’exercice judicieux de l’art de l’information.
Kâlisse! Depuis quand donne-t-on une médaille à un entrepreneur qui fait la leçon aux piétons musulmans qui traversent entre deux intersections mais qui, lui, se moque allègrement des règles éthique que tout organe de presse digne de ce nom devrait respecter et surtout, qui enfreint le Code criminel en publiant des commentaires haineux?
La question du zonage
Certains lecteurs du Hournal ont soulevé la question du zonage.
Question fort légitime, par ailleurs.
Certains avancent que le Centre islamique Badr – la Mosquée du Boulevard Langelier – accueillent un nombre de fidèles qui excède la capacité nominale de l’édifice; si tel était le cas, ce que j’ignore, le droit à la sécurité des occupants doit primer sur leurs droits de se rassembler pour la prière.
D’autres avancent que le règlement de zonage en vigueur n’autorise pas l’usage qu’en font l’imam et les fidèles; sans vouloir me prononcer sur le fond, je dirai ici – par expérience [1] – qu’il est probable que les usages permis en façade du boulevard Langelier ne puissent inclure à la fois l’usage commercial et l’usage dit institutionnel. Par « usage institutionnel », on entend « institutions d’enseignement », église, etc.
Or le Boulevard Langelier est, à l’évidence, truffé de commerces et, comme c’est généralement le cas dans semblable environnement, le zonage permet vraisemblablement un usage résidentiel aux étages supérieurs. Mais certains usages sont généralement mutuellement exclusifs – et l’usage institutionnel ne cohabite pas avec l’usage commercial; que dirait-on d’une synagogue ou d’une école primaire qui aurait pour voisins un bar de danseuses, un prêteur sur gages et un commerce d’armes de chasse [2]?
Autre chose, que le profane ignore généralement: un Conseil de ville peut réglementer, mais réglementer n’est pas synonyme d’interdire. Interdire tout usage « mosquée, église ou synagogue » sur l’ensemble du territoire, ce serait s’exposer à ce qu’un tel temple religieux puisse s’installer où bon lui semble! Voilà pourquoi on trouvera dans tout règlement de zonage une zone plus ou moins à l’écart, réservée à l’usage « maisons mobiles »… [3]
Mais si jamais l’usage institutionnel avait été autorisé à l’origine – on ne sait jamais, même si ce sont des barbus! – et si jamais ces maudits barbus n’accueillaient pas de fidèles en excédent de la capacité de l’édifice qu’ils occupent, alors les autorités municipales, elles font quoi? Elles se contentent d’interdire la traversée du Boulevard Langelier? Ou elles aménagent une traverse de piétons? À ceux qui réagiront en maugréant, je souligne que l’arrondissement d’Outremont est pas mal plus accommodant envers les Juifs du quartier, à qui il a même accordé dispense de déplacer leur véhicule le jour du Sabbat! L’enlèvement de la neige attendra et les p’tits vieux trébucheront. Et les madames en fauteuil roulant? Pourquoi s’en soucier, elles vont même pas voter!
La question à Péladeau et à matante Pauline
Entre le sensassionalisme et l’incitation à la haine, la distinction est-elle si subtile que les modérateurs ne soient pas en mesure de faire la différence?
S’tu vrai que ça vaut la peine de publier des commentaires qui incitent à la haine du mousselime? S’tu vrai que fait vendre? S’tu vrai que ça fait augmenter le chiffre d’affaires au point que l’on doive accepter le risque plus ou moins bas d’être poursuivi et condamné?
Pis, matante, t’associer indirectement au gars qui laisse publier de tels propos orduriers, ça te chatouille pas les dessours de bras?
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[1] en sa qualité d’avocat, l’auteur de ce billet a contribué activement à la préparation de règlements de zonage et d’urbanisme; en sa qualité d’élu municipal, il a siégé sur divers comités et il a présidé pendant une dizaine d’années un comité consultatif en urbanisme…
[2] L’usage dit « institutionnel » inclut aussi les bureaux du gouvernement et, pourquoi pas, les centres de détention; il arrive parfois que le manque de vision des élus municipaux provoque certaines situations plus ou moins souhaitables. À Amos, par exemple, un terrain zoné « institutionnel » et voisin d’un édifice qui regroupe le Palais de justice, les bureaux de la Sûreté du Québec et un Centre de détention régional a pour voisin une Salle du Royaume des Témoins de Jéhovah. ‘est pas tout à fait ce que les élus auraient souhaité; du moins sont-ils deux à m’en avoir fait part à quelques années d’intervalle!
Dit autrement, l’usage « institutionnel », ça peut se subdiviser; encore faut-il en avoir le réflexe!
[3] Autre problème de zonage trop fréquent: la coexistence de types d’habitation plus ou moins compatibles entre eux. L’un des pires exemples connus des Montréalais: cet affreux building d’une vingtaine d’étages, à l’intersection des boulevards Rosemont et Pie-IX. Perdu dans une forêt de duplex plutôt homogènes.
J’oubliais: l’auteur du présent billet a également reçu une (toute petite) formation universitaire en urbanisme. Formation interrompue après un an…
Dans un quartier où j’ai habité dans le passé pendant les belles années de la guerre des motards il y avait un bar juste de l’autre côté de la rue d’une école primaire.
De mémoire il y avait une explosion près du bar environ une fois par mois. C’était tellement fréquent qu’à la fin l’entrée du bar ressemblait plus à un bunker et la ville a fini par créer un nouveau règlement pour interdire le blindage des portes de commerces!
@ barefoot Luc
Dans les quartiers bâtis depuis 30, 50 ou 100 ans, le zonage est à la « va comme je te pousse ». En fait, à des époques plus anciennes, on pouvait implanter n’importe quoi, n’importe où; pour les libââârtariens, c’était l’âge d’or!
Chez nous, le McDo est déménagé vers 2004-2005 entre la Noranda High School et la Polyvalente La Source, sur un terrain autrefois non desservi en services publics pour lequel la Ville avait investi des sommes considérables, en prévision du déménagement de Canadian Tire.
Une fois les sommes dépensées, le propriétaire du Canadian Tire a décidé de s’installer sur un terrain voisin du WalMart, qui avait été réservé par Loblaw’s pour concurrencer un Provigo du secteur.
Mais Loblaw’s a acheté Provigo et a renoncé à son projet de construire à côté du WalMart; le terrain a été offert à Canadian Tire pour pas cher et la ville s’est ramassée avec un immense terrain qu’elle avait équipé à grands frais. Que faire? McDo et PFK ont offert de s’y installer et la Ville a dit oui, question rentabiliser son investissement dans ce terrain devenu éléphant blanc.
Je me suis opposé vigoureusement mais le maire – celui à qui j’ai fait perdre un référendum (et la face, et l’élection de 2005!) m’avait répondu « Quand vous aurez trouvé un moyen pour empêcher McDo de faire ce qu’ils veulent, vous me le direz! ».
J’avais répondu: « un règlement de zonage ». Mais comme la Ville voulait se débarrasser du terrain…
Aujourd’hui, on commence, au gouvernement, à penser à interdire les fast food à proximité des écoles. Trop tard, des écoles, il ne s’en construit plus beaucoup!