Selon les experts, tu ne représentes plus un risque pour la société; dans ton cas, les risques de récidives sont quasi nuls. Je ne suis pas une experte en la matière, mais mon cœur de mère et de citoyenne doute profondément de cette affirmation.
[…] Olivier et Anne-Sophie […] reposent dans un cimetière sans aucune possibilité de libération. Pourquoi en irait-il autrement pour toi? – Francine Laplante, blogueuse, 6 septembre 2014
Ça ne va surprendre personne, je ne me reconnais pas dans cette attitude revancharde et populiste à la Pierre-Hugues Boisvenu. Mon coeur de mère a parlé; les experts peuvent donc aller se rhabiller!
Je me reconnais davantage dans l’analyse éditoriale d’André-Philippe Côté, ce caricaturiste du Soleil qui s’était fait les dents au magazine satirique Safarir il y a une bonne trentaine d’années. L’image composite ci-dessus intègre à la caricature de Côté (5 septembre) une photo d’Olivier et Anne-Sophie; ça, c’est de mon cru.
Ce « subtil » lynchage de Guy Turcotte sur la place publique a donné lieu à un déferlement de plus de 700 commentaires sur le Huff Post, dont 98% sont directement inspirés de la Loi du talion.
De son côté, le portail Sympatico a offert à une autre hystérique d’exprimer sa soif de vengeance. Le billet qu’y a publié Dame Monique Crépault le 5 septembre constitue un autre bel exercice de déraison et de populisme obscène. Un article écrit avec ses tripes, qui a suscité plus de 250 réactions
Pourquoi est-ce que je ne comprends pas qu’on puisse même songer deux secondes à mettre un tel monstre en liberté ? Qu’il soit fou ou pas n’y change rien. Qu’il ait commis son crime sous l’emprise de substance n’y change rien. Il n’y a que les meurtriers qui tuent. Il a tué, il est un meurtrier et les meurtriers vont en prison (ou à l’hôpital psychiatrique à tout le moins). À perpétuité.
Ma devise, écrivait par ailleurs le vilain Crapaud: tout ce qui mérite d’être fait, mérite d’être bien fait (comme disait mon papa) 🙂 – Répertoire des Journalistes Indépendants du Québec
De toute évidence, Monique Crapaud prend trop souvent congé de son paternel… Et dire que cette chose est rédactrice en chef du magazine trimestriel Imagine, destiné aux 65000 ingénieurs du Québec, où il lui arrive de feindre une certaine capacité de raisonner. Comme cette fois où elle y était allée d’un article savant sur l’AVC, pour le quatrième numéro de 2012.
Commentaire d’une vieille dame de St-Georges-de-Beauce: Prison a vie sans aucune possibilité de sortie. – Gervaise Thibodeau. Non, la madame ne va pas s’embarrasser de la moindre nuance… Typique, malheureusement.
J’accuse
J’accuse les médias de cultiver la haine, la démagogie, le populisme de bas étage. Je les accuse de pratiquer ainsi la désinformation la plus abjecte. Je les accuse de sucer la douleur d’Isabelle Gaston.
Guy Turcotte n’a ni été trouvé coupable, ni été déclaré innocent au terme de son premier procès. À tort ou à raison, il a été jugé « criminellement non responsable », un peu comme s’il avait été atteint de somnambulisme et comme s’il avait tué pendant son sommeil. Un peu comme s’il avait été sous hypnose. Dans l’un ou l’autre cas, il ne saurait être tenu criminellement responsable, pas plus qu’il ne devrait croupir derrière les barreaux ou dans un hôpital psychiatrique pour le restant de ses jours.
L’état d’hypnose n’est pas nécessairement permanent, n’est-ce pas? Quand au somnambulisme, peut-être peut-il « se réveiller » à intervalles, mais faut-il pour autant interner un somnambule parce qu’il aurait commis un crime ou même tué?
Est-ce que les jurés ne devraient pas être libres de se fier aux experts?
Toute cette hargne, c’est malsain; c’est un douloureux rappel de ces chasses aux sorcières du 18e siècle aux USA, ou à ce lynchage sur la place publique tel que pratiqué au 19e siècle.
Coupable ou non coupable?
Depuis le premier procès Turcotte, la Cour Suprême s’est prononcée dans un autre dossier et elle a précisé un point qui – par le fait même, est maintenant d’une importance capitale.
Au premier procès Turcotte, il suffisait que l’accusé soit atteint d’une folie passagère pour que soit rendu un verdict de non responsabilité criminelle. Lors du deuxième procès Turcotte, les jurés devront se prononcer sur un tout nouveau point: qu’est-ce qui vient avant? L’oeuf, ou la poule?
Disons ça autrement: est-ce que Turcotte a bu du lave-glace parce qu’il vivait un épisode de folie temporaire, ou s’il a vécu un épisode de folie temporaire à cause de l’ingestion de lave-glace?
Quand Turcotte a eu son premier procès c’était pas nécessaire de déterminer si l’ingestion de lave-glace a pu contribuer son l’état mental passager. Pour son 2e procès, le point central, ce sera ÇA.
Évidemment, je ne livre pas ici une simple opinion personnelle; j’exprime l’état du droit.
Si après avoir entendu ce 2e procès les jurés en viennent à la conclusion que l’ingestion du lave-glace a provoqué l’état de folie passagère, alors ils vont devoir trouver Turcotte coupable.
Par contre, si ils en viennent à la conclusion que l’ingestion de lave-glace n’a PAS contribué à son état mental, alors, légalement, il ne pourrait pas être trouvé coupable de meurtre et le verdict devrait ressembler au verdict du premier procès. Perso, et même si cette preuve n’a jamais été faite, je suis enclin à pencher pour la première hypothèse.
Pourquoi, cette distinction? Tout simplement parce que si on choisit volontairement de s’intoxiquer au point de perdre la raison (alcool, drogue, pilules ou whatever), en revanche, on ne choisit jamais d’être mentalement atteint (dépression sévère, paranoïa, schizophrénie, trisomie ou tout ce que vous voudrez.
On ne choisit pas davantage d’être somnambule. Ni d’être dépressif. Ni de perdre la tête… à moins de consommer suffisamment de booze pour savoir qu’on ne pas plus être en contrôle de ses actes…
Pendant un spectacle de Messmer, c’est en toute connaissance de cause que ses « victimes » acceptent de lui servir de cobaye; la plupart, toutefois, doutent de ses pouvoirs hypnotiques et se croient ainsi à l’abri. Mais imaginons le scénario où un maître-hypnotiseur ordonnerait à la personne sous hypnose – sans que la victime n’ait été informée de ce stratagème, d’aller poignarder Stephen Harper devant des millions de téléspectateurs?
Les deux blogueuses citées plus haut tiendraient-elles le même discours? J’ose croire que non.
Turcotte doit-il être libéré en attendant son deuxième procès?
Le juge André Vincent a entendu divers témoins, dont quelques-uns ont pu livrer une opinion d’expert, sur l’état actuel de Guy Turcotte et le danger qu’il peut représenter aussi bien pour lui-même que pour des tiers – à commencer, bien sûr, par Isabelle Gaston et son conjoint. La décision doit être rendue le 12 septembre et, en attendant, la meute des chacals retient soin souffle.
Si les témoins experts affirment que Turcotte ne représente aucun danger, bin… c’est ça, la preuve disponible. Le deuxième critère, c’est la crainte que Turcotte puisse fuir la Justice, mais, encore là, d’une part il ne peut sortir du pays sans passeport et, d’autre part, il a joui de longs mois de liberté surveillée après avoir été autorisé à réintégrer graduellement la société, et… il n’a ni cherché à fuir, ni cherché à se suicider, ni cherché à entrer en contact avec Isabelle Gaston, ni manifesté le moindre signe extérieur de danger. Turcotte a donc satisfait aux deux premiers critères.
Reste le troisième: sa libération risque-t-elle d’anéantir la confiance du public dans le système judiciaire?
Si on s’en tient à l’opinion largement répandue sur les blogues et dans les lignes ouvertes, la réponse, c’est OUI. La question est-elle réglée pour autant? Je ne le crois pas.
D’une part, des parents infanticides ont déjà obtenu leur libération en attendant leur procès. Présomption d’innocence… D’autre part, de quelle opinion publique le juge doit-il se préoccuper? Des cris hystériques d’une meute mal informée qui n’exprime que des préjugés tenaces ou une volonté morbide de vengeance? Ou d’une opinion plus minoritaire, mais davantage fondée sur la raison?
Si la décision m’appartenait, Turcotte serait libéré… et ma décision comporterait une analyse très poussée de cette dictature plutôt malsaine d’une opinion publique manipulée par une armée de démagogues populistes dont les arguments sont inexistants.
Il y a aussi que la Justice est affaire de droit et de droiture. Là où triomphent l’arbitraire, les préjugés et l’ignorance, la Justice recule.
Le danger, ça n’est pas tant Guy Turcotte que cette intolérance qui s’installe, mue par l’ignorance collective.
_[parenthèse 11 septembre]_
Ce billet est publié à quelques heures d’un bien triste anniversaire.
Le rappel du 11 septembre 2001 est d’autant plus amer qu’après la tragédie était venue la vengeance collective – plus ou moins rationnelle, qui devait servir de catharsis à une Nation atterrée et humiliée.
Après le 11 septembre, ce fut l’Iraq, où l’Amérique s’en est allée pour extirper Al Quaïda d’une contrée où Al Quaïda n’existait pas. Et après l’Iraq vint le Califat islamique – un nouvel Ordre à ce point sanguinaire et menaçant que l’Amérique fait maintenant front commun avec l’Iran des Mollahs pour le combattre. Et même, ô horreur, avec Al Quaïda? Diantre… cachez cette alliance que l’Amérique ne saurait voir.
Je réitère mon récent commentaire sur votre article Turcotte en septembre 2013. Vos écrits m’ont séduite… J’ai de la lecture à rattraper sur tous les autres sujets que vous abordez ici, au plaisir!
Papi, je ne comprends pas pourquoi les juges considèrent l’opinion publique, dont l’ex conjointe. Elle aurait peur de lui?! Si j’avais peur de mon ex, je serais TRÈS low profile pour qu’il m’oublie, je ne me pavanerait pas à la Cour devant lui , ni même dans les médias, encore moins pour annoncer via TVA que j’ai déménagé et ai maintenant un nouveau # confidentiel… pour ensuite s’adresser à lui directement à la caméra, et ce durant sa liberté. Depuis le début elle fait intelligemment « 1, 2, 3 » mais péniblement « 3, 2, 1 ».
Ceci dit, les Gaston ont travaillé très fort pour entretenir cette tollée de frustrés (minoritaires) ce qui est inacceptable, Turcotte pas Turcotte. Le 3e critère porte en effet à confusion.
Selon vous, quelle serait la preuve pour justifier une accusation de meurtre prémédité?
@Jo 19h05
niveau de preuve
La différence entre le premier et le deuxième procès Turcotte, c’est que, dans l’intervalle la Cour Suprême a modifié le droit applicable. Pas la Loi. Le droit… qui inclut la Loi et la jurisprudence interprétative. Au deuxième procès, il deviendra important de savoir si c’est un état de folie passagère qui a déconnecté Turcotte de la réalité ou si son absorption de liquide lave-glace a contribué à le déconnecter au point où il ne savait plus ce qu’il faisait.
Bref, il sera plus difficile pour Turcotte de s’en tirer avec un verdict de non-responsabilité criminelle.
le poids de l’opinion publique
Perso, je trouve particulièrement indécente la campagne démagogique de la famille Gaston. Et je ne pense pas que ce soit un hasard si cet histérique de mononc’ Patrick Gaston a été tenu à l’écart cette fois-ci; j’ai l’impression que les avocats de la famille lui ont mis une muselière, qu’ils lui ont administré un puissant sédatif et qu’ils l’ont enfermé avec les pitbulls.
Isabelle Gaston manque de jugement et de sens critique; je ne la laisserais même pas approcher la bouche d’un enfant avec la petite languette de bois « Ouvre la bouche et dis Aaaaaah!« .
Mais sa douleur est bien réelle; j’ai perdu un enfant, elle en a perdu deux, et je comprends. C’était une figure sympa, tous les parents du Qc se sont identifiés à elle et ont partagé sa douleur. Turcotte a commis deux meurtres crapuleux… mais s’il n’était pas plus conscient que ne l’aurait été un somnambule ou un type sous hypnose, bin… peut-être qu’on ne peut plus parler de meurtre? Alors Turcotte est-il le monstre que veut bien décrire la Gaston? Peut-être que oui, peut-être que non. Ça va dépendre du procès…
Ce que je trouverais indécent, c’est que la décision de la Cour sur la libération provisoire puisse s’appuyer sur une campagne de peur savamment orchestrée auprès de citoyens qui ignorent tout des règles du jeu. Si la Cour d’appel devait renverser le principe énoncé par le juge qui a accepté de libérer Turcotte, ça voudrait dire qu’il suffira désormais d’ameuter l’opinion publique pour parachuter une décision judiciaire. Ça tient du lynchage public en vigueur dans le sud des USA au tournant du 20e siècle, alors qu’un Noir n’avait aucune chance de rallier l’opinion publique des Blancs. Par contre, aussi crapuleux pouvait être en toute objectivité le crime d’un Blanc, il demeurait impuni et on trouvait un criminel substitut – nègre ou « sauvage ».
La Justice à la Gaston, désolé, mais c’est de la marde. La règle DOIT demeurer celle d’un critère objectif – celui du citoyen bien informé, plutôt que celle de l’ignorant chronique. Voilà…
Merci Papi! Compte tenu des campagnes démagogiques – comme vs le dites si bien – de Mme, il devrait y avoir une injonction de la Cour Supérieure et interdire ses intervention publiques ou autoriser sa présence en cours (pour cette cause), seulement durant les plages où un subpoena lui ordonnerait de témoigner. Faisant aussi référence aussi à ses petites scénettes ds l’assistance au 1er procès, pas correct pour les jurées… Out!