
La Cour supérieure a rejeté la demande d’injonction logée par Jean-Martin Aussant et son parti émergeant, Option Nationale; il ne participera ni au débat organisé par les réseaux publics (SRC et TQc), ni aux face-à-face mis en ondes par TVA.
La jurisprudence ne comporte aucun précédent sur lequel je pourrais m’appuyer pour forcer les réseaux à faire une place à Option Nationale, a dit le juge. Comme il ne s’agit pas d’un temps d’antenne mis gratuitement à la disposition des partis, l’équité n’est pas en cause et les diffuseurs peuvent donc inviter qui ils veulent bien inviter.
Une logique un peu square, à mon avis. Une logique qui confère à un oligopole de diffuseurs le pouvoir de décider à quelles sources le bon peuple pourra s’abreuver, quelles options politiques lui seront présentées et, par conséquent, le pouvoir d’orienter le choix des élus.
Certes, le pouvoir politique ne DOIT pas s’immiscer dans le contenu de la programmation des diffuseurs. Mais la diffusion d’un débat public entre chefs de partis n’est ni un divertissement, ni du temps d’antenne mis gratuitement à la disposition des différents partis, ni même une émission d’affaires publiques où l’animateur peut bien inviter qui il veut et quand il le veut. C’est un exercice démocratique essentiel.
La Cour a fait abstraction de ce constat: c’est le public en général qui est lésé, et privé de la possibilité de comparer l’offre électorale d’Option Nationale à celle de ses adversaires.
Voilà pourquoi l’organisation et la diffusion des débats politiques transcende les seuls droits et privilèges des diffuseurs et tombe dans le domaine de l’ordre public. Voilà pourquoi elles devraient être balisées, de manière à ne laisser aucun espace à l’arbitraire et au risque de décisions abusives.
Diffuser n’est pas un droit; c’est un privilège. Ça n’est pas là une opinion personnelle ou l’expression d’un voeu pieux; c’est du droit! Quelqu’un – et c’est le CRTC – doit arbitrer les conflits entre deux réseaux qui souhaiteraient diffuser dans le même marché sur la même bande 91,5 FM, ou qui voudraient diffuser sur le même canal 38. Et l’usage des ondes constitue un privilège, il doit être assorti de certaines règles destinées – entre autres – à assurer le respect des principes les plus élémentaires en matière de démocratie.
Je ne m’en cacherai pas, si on m’avait demandé de définir les balises de ce genre de débats, Option Nationale aurait difficilement trouvé grâce à mes yeux. Surtout que je suis de ceux qui estiment qu’un député qui vire capot au profit d’une formation autre que la sienne devrait démissionner et se présenter à sa propre succession; je suis toutefois ouvert à la possibilité qu’un député puisse échapper à cette règle s’il accepte de siéger comme indépendant.
Le fait que jamais personne n’ait été élu sous la bannière d’Option Nationale me paraît un empêchement, encore qu’un taux de 5% dans les sondages – selon une méthode éprouvée et pré-définie – me semblerait suffisant pour forcer l’invitation aux débats des chefs.
Le problème, tel que je le perçois, c’est que personne n’a jamais été davantage élu sous la bannière de la CAQ, et la CAQ, faut-il le rappeler, n’est pas l’héritière de la défunte ADQ, dont elle a choisi de ne pas se rendre responsable du passif.
Fort bien, objectera-t-on, mais à la différence d’Option Nationale, la Coalition Avenir Québec comptait huit députés au moment de la dissolution de l’Assemblée Nationale. J’en conviens. Mais alors, où doit-on tracer la ligne au delà de laquelle une nouvelle formation peut et doit être invitée à un débat des chefs?
Doit-on laisser à des réseaux, ou à un consortium de réseaux publics et privés, le soin de déterminer entre eux et derrière des portes closes qui devra et qui pourra être invité? Lire la suite