Bah bah bah, Barbara Kay… Bah bah bah, the bitch is free. .. Full Disclosure – transparence totalement full: j’ai autrefois commis sur ce blog une opinion que je n’ai jamais reniée et que je maintiens contre vents et marée: compte tenu des contraintes reliées à la provenance des juges de la Cour Suprême, et compte tenu également de la nécessité de pourvoir les postes vacants en fonction d’un éventail de spécialités aussi large que possible, il peut arriver, à l’occasion, que LE meilleur candidat soit un juge unilingue, docteur en droit de la faillite et originaire de l’Alberta [1]. Mon opinion, je la maintiens… mais je crois devoir la préciser a little bit. Le juge Marshall Rothstein – lui-même avocat unilingue à Winnipeg au moment de sa nomination par les Conservateurs en 2006, était un expert en droit des transports et droit de la concurrence; au moment où ses 75 ans le contraignent à la retraite, sa maîtrise du français lui permettait de suivre les débats en français. Celui qui sera appelé à occuper son siège, le juge Albertain Russell Brown, est lui-même reconnu pour son expertise en droit de la concurrence , en droit commercial et en responsabilité médicale. Apparemment, c’était plut¸ot le tour de la Saskatchewan… mais l’Ouest – as a whole – maintient son poids. Et la Cour remplace un expert en droit de la concurrence par un autre expert en droit de la concurrence. Mais Russell Brown est-il fluent en langue belingouale? That is the question: le communiqué ne le précise pas… ce qui semble confirmer qu’il n’est pas bilingue pour cinq cennes! Cela dit, il est plus facile pour un excellent juriste unilihgouale d’apprendre la françéze que pour un juriste bilingue mais à moitié poche de devenir un bon juge… Lire la suite
Marshall Rothstein
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En guise d’apéro: une cuillèrée de poudigne-chômeur
Notre universelle et paternelle affection à ces -multitudes de souffrants et de déshérités du monde que vous vous employez à secourir et à promouvoir, et qui vous honorent aussi de leur identification au Seigneur Jésus: «Ce que vous ferez au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le ferez» (Mathieu 25, 40). – Paul VI, 9 mai 1969, discours devant l’Assemblée générale de Caritas Internationalis
Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli… Ça, c’était Mathieu 25, 35.
Car s’il est mis au chômage, vous l’affamerez; s’il fait une demande de prestations, vous la lui refuserez; et s’il souhaite porter ce refus en appel, les motifs de votre décision ne lui montrerez ni accès à son dossier ne lui donnerez. – Stephen Harper, épître à Service-Canada
À la Vérité, à la Vérité je vous le dis, mécréants: vous disposerez de 30 jours pour faire appel du refus désormais quasi automatique… mais les motifs de ce refus, c’est pas de vos crisses d’affaires! Si vous insistez… bin passez par la Loi sur l’accès à l’information, payez à même ces prestations dont je vous aurez privés, et quand mes fonctionnaires auront daigné vous répondre, vos délais d’appel seront expirés [1].
Ça vous apprendra à vous pogner le beigne aux dépens des honnêtes travailleurs de l’Alberta, gang de parasites!
Le plat principal
Dis-moi qui tu nommes, je te dirai qui tu es…
Le Canada connaît DEUX systèmes de droit, dont l’un a été imposé par le conquérant anglais – la common law – et l’autre constitue l’héritage du régime français et ne reçoit application qu’au Québec: c’est le droit civil, articulé autour du Code du même nom. Les Pères de la Confédération ont fait preuve d’une grande sagesse quand ils ont convenu entre eux de réserver trois des neuf sièges de la Cour suprême du Canada à des juges issus du système civiliste propre au Québec.
C’était le prix à payer pour garantir un minimum vital de connaissance des questions de droit civil par « le plus haut Tribunal du pays » [2]. Cette disposition a été reprise à l’article 6 de la Loi sur la Cour suprême:
«Au moins trois des juges sont choisis parmi les juges de la Cour d’appel ou de la Cour supérieure de la province de Québec ou parmi les avocats de celle-ci.»
La nomination de Marc Nadon ne respecte pas la lettre de la Loi – du moins, telle que rédigée avant qu’elle ne soit amendée ce jour un article perdu dans la loi mammouth (plus de 300 pages) présentée par Jim Flaherty. Elle en respecte toutefois l’esprit apparent, dans la mesure où le bonhomme a bel et bien été membre du Barreau du Québec pendant les dix années qui suffiraient à le rendre éligible. Cette nomination remplit-elle les objectifs qu’avaient en tête les Pères de la Confédération? NON. Lire la suite
La Cour Suprême du Canada vient de démontrer encore une fois à quel point les rednecks du Rest of Canada sont inconscients des privilèges dont jouissent les anglophones au Québec. Suffit de comparer avec le sort réservé aux francophones devant les tribunaux en Britiche Columbia.
Une fédération de parents et un Conseil scolaire francophones reprochent au ministère de l’éducation de la Colombie Britannique la violation de certains droits et intentent des procédures au soutien desquelles ils entendent déposer des affidavits rédigés en français par un certain nombre de parents. Le ministre fait objection au dépôt au dossier de ces documents, à moins qu’ils ne soient accompagnés d’une traduction en langue anglaise. Le Ministre a obtenu gain de cause tant en première instance qu’en Cour d’Appel.
À quatre contre trois, la Cour Suprême tranche en faveur du gouvernement CONTRE les requérants francophones.
Toute l’affaire repose sur l’interprétation d’une loi votée par le parlement de Londres en… 1731. Il y a 282 ans, donc. Comment une Loi anglaise de 1731 peut-elle lier les tribunaux de Colombie Britannique en 2013? Là n’est pas vraiment la question.
Les trois juges dissidents sont d’opinion que la prohibition contre l’usage de langues étrangères dans les «proceedings» – aussi largement qu’on puisse définir le terme «proceedings» – ne traite pas de la langue des pièces déposées en preuve et n’empêche pas le dépôt ou l’admission d’un document dans une autre langue que l’anglais, même si les témoignages sont soit présentés en anglais soit traduits dans cette langue.
Les quatre juges de la majorité estiment au contraire que la Loi de 1731 porte non seulement sur la langue des documents déposés au tribunal, mais aussi sur celle des jugements, des ordonnances, des procès et des éléments de preuve. Le résultat, selon eux, c’est que même dans l’hypothèse d’un litige qui opposerait des francophones entre eux, chacun étant représenté par des avocats francophones, le juge n’aurait pas discrétion pour accepter le dépôt en preuve de documents rédigés en français sans qu’une traduction en langue anglaise les accompagne. Dans l’affaire qui nous intéresse, la juge au procès a déjà enseigné le français.
Avant d’analyser sommairement la décision, quelques mots sur les juges qui ont participé à la décision. Lire la suite
La nouvelle ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles, Shelly Glover, maintient que la nomination de juges bilingues à la Cour suprême du Canada n’est pas essentielle, même si elle est souhaitable.
Interrogée sur cette question à la radio de Radio-Canada jeudi matin, Mme Glover, qui avait voté contre le projet de loi sur le bilinguisme à la Cour suprême en 2009, a réitéré sa position. Elle explique que l’obligation de trouver des juges bilingues ne permettrait pas de recruter les meilleurs candidats.
[…] « Quand on regarde le bassin des juges qui sont qualifiés dans les domaines nécessaires pour devenir juge de la Cour suprême, c’est un bassin qui est pas mal petit déjà. » — Shelly Glover, ministre du Patrimoine canadien et des langues officielles / Radio-Canada via Huff Post, 18 juillet 2013
Des commentateurs ont commenté sur le Huff Post, bien sûr:
- Les seul unilingue compétant sont anglophone!!! Quel hasard. Y a t`il déjà eu un unilingue franco. à la cour suprême??? J`aimerais que l`on m`éclaire la dessus…. – Rossign
- Si un juge n’est pas assez intelligent pour parler plus qu’une langue, pourquoi devrait’il être juge.Le colonialisme dans toute sa splendeur – mouche à feu
- Maintenant, le point que la ministre fait est clair; que le meilleur juge disponible obtienne le poste, c’est tout. Asser logique dans un pays de lois. Allez, bashez moi maintenant avec vos vieilles rancoeurs de 400 ans…je me souviens, je me souviens d’être né pour un petit pain!! – Canadian Pat
- Le problème des juges de la Cour suprême n’est pas tant qu’ils ne comprennent pas nos us et coutumes, nos traditions, et nos lois dans leur langue originale, mais bien qu’ils aient un mot à dire – et le dernier mot! – sur tout cela!!! – Wictor
Mon opinion à moi, qui suis pourtant souverainiste (et juriste depuis encore plus longtemps!), rejoint celle de madame la ministre. Ça n’est pas la première fois que je m’en confesse; cette fois, je vais m’en expliquer.
La règle 3+3+3=9
La Cour Suprême ne date pas d’hier. De tout temps, elle a été formée de trois juges du Québec, trois juges Ontariens et trois juges venus d’ailleurs.
Ce « Ailleurs » a évidemment beaucoup évolué depuis les premiers balbutiements de la Cour en 1875. À l’époque, c’était le BC, un mini Manitoba, et les trois provinces de l’Est (L’Alberta et la Saskatchewan ont joint la Confédération en 1905 et Newfoundland, en 1949).
La lecture des jugements rendus par la Cour Suprême à l’époque jurassique, c’est le supplice qu’on impose aux étudiants en droit. À l’époque, quand le litige opposait des Rest of Canadians, les juges québécois Henri E. Taschereau (1878-1906), Louis-Philippe Brodeur (1911-1923) ou Pierre-Basile Mignault (1918-1929)(1) ou Thibaudeau Rinfret (1924-54) – pour ne nommer que ceux-là , rendaient leurs décisions en anglais… et il n’en existait même pas de version française; par contre, leurs collègues anglophones rendaient leur décision en anglais – sans qu’il n’existe évidemment une version française officielle – même quand le litige opposait des pure-laine unilingues.
Il y a quand même eu du progrès, non? 😉
Cela dit, l’Ontario (Louise Arbour, 1999-2004; Louise Charron, 2004-2011) et le New-Brunswick (Gérard La Forest, 1985-97; Michel Bastarache, 1997-2008) ont fourni à la Cour Suprême des francophones, alors que le Québec y déléguait quelques anglos (Charles Fitzpatrick, 1906-1918; Douglas C. Abbott, 1954-73; Morris Fish, 2003-2013) (2). Si bien qu’au début des années 2000 et jusqu’au remplacement du juge Gonthier par le juge Fish, la Cour Suprême a compté 5 francophones et 4 anglos.
Bof! Tous les juges francophones sont bilingues, isn’t it?
Parmi ces commentaires extraits du Huff Post, il y a celui de Wictor, qui se plaignait notamment du fait que ce soit des étranges – ignorants de nos us et coutumes – qui ont le dernier mot sur des litiges qui impliquent des pure laine.
Quelques précisions s’imposent.
Jusqu’en 1949, la Cour suprême n’était pas si suprême que ça; il était alors possible d’en appeler d’une décision de la Cour Suprême devant le Comité judiciaire du Conseil Privé de sa Gracieuse Majesté, à Londres. Techniquement, donc, devant le Roi lui-même (!), alors assisté de (généralement) cinq conseillers en loi. Point n’est besoin de préciser que la connaissance du français n’était pas exigée de ces Lords anglais qui siégeaient également en appel des décisions provenant de tout le Commonwealth. Dont l’Inde, Hong kong, la Malaisie, le Sri Lanka (Ceylan), toutes contrées où l’usage de l’Anglais pratiqué par les Lords était relativement peu répandu.
Et puis, le juge n’a pas besoin de connaître nos us et coutumes. Ni les us et coutumes d’un inuit accusé de meurtre. Non pas que ce ne soit pas important dans la détermination du degré de culpabilité ou dans l’évaluation de la peine la plus appropriée, bien au contraire. Sauf que, en droit, à part les trucs qui sont de commune renommée (genre: l’eau gèle à 0 Celsius, 2=5=7, etc), on ne permet pas à un juge de prendre en compte son bagage de connaissances personnelles; il ne doit tenir compte que de ce qui a été mis en preuve. Incluant les us et coutumes…
La représentation territoriale… et par domaines d’expertise
Huit provinces – et les territoires – doivent se partager, en rotation, les trois juges qui ne doivent venir ni de l’Ontario ni du Québec. Pour le Québec et l’Ontario, c’est plus simple: un juge du Québec doit être remplacé par un juge du Québec.
Il pourrait arriver que le meilleur juriste disponible soit un Néo-Brunswickois de Moncton, parfaitement bilingue et spécialiste du droit constitutionnel. Mais, non, il n’a aucune chance… surtout si la Cour compte déjà un ou deux spécialistes du droit constitutionnel. C’est que le Nouveau-Brunswick a déjà délégué à la Cour aussi bien le juge La Forest que son successeur, le juge Bastarache. Pire encore, deux Acadiens, qui ont occupé le poste pendant près d’un quart de siècle sans interruption. Comme le Nouveau-Brunswick est 6 ou 7 fois moins peuplé que le BC ou l’Alberta, les chances d’un juriste de cette province d’accéder à la Cour Suprême dans le prochain quart de siècle sont plutôt minces.
Disons que – par hypothèse – c’est le tour de la Saskatchewan. Disons aussi que, par hypothèse, la Cour se trouve dépourvue de spécialistes en droit de l’environnement. Pas sûr, moi, qu’on pourra trouver un candidat bilingue à Saskatoon qui, en plus, aura enseigné en droit de l’environnement ou pratiqué dans ce domaine.
Quand la ministre Shelly Glover fait allusion à l’étroitesse du bassin des candidats, c’est ça qu’elle a en tête. Enfin, je présume que les jurisconsultes du gouvernement l’ont briefée en ce sens avant qu’elle ne s’ouvre la trappe.
Il est plus facile d’apprendre suffisamment la langue seconde que de devenir une sommité dans un domaine particulier du droit. Et, bien sûr, plus facile d’apprendre la langue seconde que de déguiser un Ontarien en Albertain – Stephen Harper étant l’exception qui confirme la règle! 😉
Le souverainiste que je suis se désole de la présence de deux juges unilingues à la Cour Suprême. Je conviens qu’il pouvait être relativement difficile de dénicher un bilinguouale au Manitoba; bien sûr qu’il s’en trouve plusieurs, mais pas nécessairement avec le profil recherché, et pas nécessairement chez les avocats d’allégeance conservatrice. Ça nous a donné Rothstein en 2006, mais il va quitter en 2015.
La nomination de l’Ontarien Moldaver en 2011 – l’autre unilingouale – m’agace davantage; après tout, l’Ontario compte autant d’avocats qui maîtrisent le français que le Manitoba ne compte d’avocats! C’est un criminaliste accompli, dont la nomination en 2011 visait à combler le poste laissé vacant par le départ de la franco-ontarienne Louise Charron, elle-même une criminaliste issue de la « Couronne« .
Remplacer une francophone ontarienne par un ontarien unilingue, désolé, mais c’était là faire preuve de mépris à l’égard des francophones a mare usque ad mare. D’autant plus que des criminalistes de haut niveau qui sont par ailleurs bilingues, il n’en manque pas en Ontario. Que Moldaver puisse les dépasser d’un quart de pouce en matière de compétence, c’est possible, mais ça n’a pas d’importance; c’eut été toute autre chose si les autres candidats potentiels n’avaient présenté que 60% des qualités de Moldaver, mais ce n’est pas le cas!
Que les juges Moldaver et Rothstein – les deux unilinguales de la Cour – soient de confession juive, je m’en crisse et ça n’a rien à voir avec la colère qui monte en moi. Par contre, politiquement, au Québec, ça pourrait poser problème et Harper aurait pu essayer d’y penser. Voilà.
Glover et le sens de l’éthique
Son opinion sur le bilinguisme des juges se tient – à la rigueur. J’ose toutefois espérer qu,elle ne sera pas le reflet de ce que la madame pense du bilinguizime en général. Après tout, elle est ministre du patrimoine et des langues zofficielles.
Mais peut-être est-ce de son sens de l’éthique qu’il faudrait se préoccuper. Pour une ancienne policière, heu… La nouvelle date d’un mois déjà mais à l’époque, la madame n’était pas ministre et c’était passé sous le radar:
La députée manitobaine Conservatrice Shelly Glover a changé d’avis et a décidé de déposer une nouvelle demande de remboursement auprès d’Élections Canada pour la campagne électorale de 2011.
Le Président de la Chambre, Andrew Scheer, a rendu publique mardi [NDLR: 18 juin 2013] la décision de la députée de Saint-Boniface, en même temps qu’il référait à un Comité la délicate question de la suspension éventuelle de Glover du député conservateur de Selkirk-Interlake, James Bezan, en raison des allégations de dépenses électorales douteuses qui pèsent contre eux. – Global News, 19 juin 2013 [traduction par l’auteur]
Nice shot, de la part d’un Premier Ministre déjà aux prises avec des éclosions de manquements à l’éthique chez ses ministres.
Bref, plus ça change, et plus c’est pareil!
Bonne sumine!
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[1] Mignault a laissé à la communauté juridique un immense traité de droit civil; je me dois ici de souligner que non seulement son petit-fils a-t-il pratiqué le droit à Rouyn (qui n’était pas encore Rouyn-Noranda) mais que ce Mignault-là et moi avons partagé à deux décennies d’intervalle les mêmes meubles et les mêmes secrétaires – enfin, quelques unes!
[2] le juge Fish aura 75 ans le 16 novembre 2013; c’est l’âge de la retraite obligatoire. Un autre membre québécois de la Cour Suprême, Louis Lebel, en sera évacué pour raison d’âge avant la fin du mandat du présent gouvernement, lui qui célébrera son 75e le 30 novembre 2014. Les trois juges québécois seront alors des loyaux Conservateurs, l’autre étant le fils me Claude Wagner, M. Law and Order…