Ne me plains pas, non,
un matin clair efface la nuit entière,
je voulais juste dire
qu’il y a des choses dont on ne meurt pas,
en tout cas pas nécessairement.
J’aurai mille ans hier
– et demain
encore le coeur d’un clown…
Village De Lorimier
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Treize décembre 1909.
Le Canadien de Montréal – et ma maman à moi – tous deux nés le même jour dans le même quartier, n’avaient pas encore cent heures quand tomba comme une tonne de briques le verdict de la Commission royale d’enquête sur la corruption qui régnait à Montréal.
Quant au Village De Lorimier, sur le territoire duquel j’ai grandi, il n’a survécu que quelques semaines à la publication du rapport de la Commission Royale d’enquête; le 31 décembre, cette année-là, il était annexé à la Ville de Montréal. Ceci explique-t-il cela? Peut-être bin que oui; après tout, l’île de Montréal connaissait à l’époque une explosion démographique aussi spectaculaire que Calgary 100 ans plus tard, et comme le Commissaire Cannon en a pu faire l’exposé dans son rapport de 137 pages clavigraphiées sur papier écolier, la direction était trop décentralisée, ce qui a donné naissance au patronage et donné lieu à l’émergence de roitelets tout-puissants dans leur royaume respectif.
Le duplex où j’ai grandi était surmonté d’un péché d’orgueil: une corniche, fièrement marquée 1909. Tous les duplex du voisinage immédiat portaient semblable inscription, destinée à marquer l’année de leur construction. À la fin des années ’60, tous ces péchés d’orgueil avaient disparu; de toute évidence, la mention 1909, c’était alors moins vendeur. Et puis, certaines de ces corniches menaçaient ruine!
Mais, fin 19e et début 20e siècle, les nouvelles rues poussaient comme des champignons et là où on construit des nouvelles rues, il y a des tuyaux, des trottoirs, du pavage… bref, il y a des sangsues qui collent aux orteils des élus pour téter leur dû!
Le juge Cannon avait conclu:
Reste la division et la représentation de la ville par quartiers. Tout le monde s’accorde à condamner ce système qui a donné naissance au patronage et à ses abus.
Je recommande aux citoyens de Montréal , après une étude sérieuse, d’adopter un autre système créant un conseil composé d’échevins représentant la cité toute entière et travaillant à l’unisson pour son agrandissement et pour la rendre prospère.
Le Conseil d’aujourd’hui est composé de groupes et de coteries lutant [sic] entre elles avec tant d’acharnement qu’elles perdent nécessairement de vue les intérêts supérieurs de la communauté.
Quant aux poursuites civiles et criminelles auxquelles la preuve faite dans cette enquête pourrait donner naissance, le Conseil élu au prochain scrutin devra adopter la ligne de conduite à suivre.
Le tout, néanmoins, humblement soumis.
L.J. Cannon, Commissaire
Et il a identifié de nombreux coupables! Parmi lesquels, et je le cite:
Vu cette disposition de la loi, je déclare qu’il a été établi, au cours de l’enquête, qu’il y a eu malversation de la part de W.J. Proulx, échevin et président de la Commission de police, J.E.E. Lespérance, échevin et président de la Commission de l’Hôtel de ville; des échevins J.P. Gadbois, J.G. Duquette, Major, J.G. Couture, J.H. Nault et Médéric Martin ; mauvaise administration et malversation de la part de l’ex-chef Benoit, de la brigade des pompiers, dans les nominations et les promotions chez les membres de cette brigade, de la part du quartier-maître Holland, des sous-chefs Dubois et Marin, de l’ex-capitaine Viau, du pompier Chs. Rioux, de l’ex-pompier Jos. Godbout, de O.J. Monday, de Jos. Desautels, de Rodolphe Brunet et d’Ernest Bélanger.
Retenons un seul nom parmi ces auteurs de malversations, celui de Médéric Martin. J’y reviendrai.
On croirait lire la transcription des témoignages entendus ces derniers mois devant la Commission Charbonneau! Du tripotage dans les devis, de la collusion et de la simulation entre les soumissionnaires, des cadeaux de type pot-de-vin, des matériaux facturés mais remplacés par des plus cheaps, des élus qui magouillent pour nommer leurs hommes à eux à des postes-clé… Lire la suite