Sujet délicat, s’il en est.
Sujet que d’ailleurs, je n’aurais pas osé aborder si je n’avais que 22, 33 ou même 44 ans; mais voilà, j’ai été conçu, fabriqué et livré à la fin des années ’40, et j’ai moi-même atteint l’âge auquel on peut prétendre à certains rabais pour raison d’âge, que ce soit à la piscine, chez M&M, à la salle de spectacles ou dans les autocars. Alleluia!
Bon an, mal an, le Québec enregistre plus de de 20000 nouveaux cas de démence, ai-je pu conclure de cette statistique suivant laquelle survient un nouveau cas toutes les cinq minutes au Canada.
À moins que leur droit de vote leur ait été retiré massivement, ils sont donc quelques centaines de milliers à avoir le droit de vote. Selon la répartition géographique et idéologique de leur vote, les Québécois atteints de démence pourraient donc – en théorie – changer la carte politique du Québec et porter au pouvoir un parti destiné à former la deuxième opposition, ou inversement!
Au cours des derniers mois, la Sénatrice Libérale Joyce Fairbairn – âgée de 72 ans – siégeait encore quatre mois après qu’elle eut été déclarée légalement inapte suite à un diagnostic de démence; pendant cette période de quatre mois, elle a participé à une douzaine de votes (en suivant la ligne de parti).
De toute urgence, il faudra légiférer pour corriger cette situation absurde où les Lois sont votées non seulement par des imbéciles élus par plus imbéciles qu’eux, mais surtout par des législateurs atteints de démence!
Fraude électorale aux dépens des aîné(e)s et des handicapé(e)s
Reste toutefois le cas des électeurs qui ne sauraient reconnaître leurs conjoint(e) et enfants, mais à qui des gens « bien intentionnés » font remplir des milliers de bulletins de vote.
Depuis dimanche, des scrutateurs parcourent le Québec pour faire voter des personnes âgées qui sont parfois atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de démence. Le phénomène relance le débat sur les personnes aptes à voter.
Assistante infirmière-chef dans un centre d’hébergement de Saint-Jérôme, Mélissa P. Audet, a vu voter une douzaine de personnes dans son établissement dimanche.
« Cinq ou six ne savaient même pas qu’elles venaient de voter quand je leur ai posé la question après que les scrutateurs soient sortis de leur chambre », dénonce-t-elle.
[…] « Quand la personne qui la faisait voter a enlevé le gros carton devant elle, elle leur a demandé “ Qu’est-ce que vous allez faire avec ça ? ” Elle n’avait aucune idée du geste qu’elle venait de poser », raconte-t-elle, en soulignant avoir expliqué en vain que sa mère n’avait plus sa mémoire.
Mélissa P. Audet a tenté de convaincre les scrutateurs que ses patients n’ont pas la capacité de faire des choix éclairés. Lisette Landry, infirmière dans un centre d’hébergement de l’Assomption, a fait de même. Dans les deux cas, les explications de ces professionnelles sont restées vaines. – Anne Caroline Desplanques, le Journal de Québec, 28 août 2012
Des « personnes bien intentionnées », il en existe de toutes les sortes. Parfois, ce sont des enfants qui accompagnent un vieux parent. Parfois, ce sont des officiers d’élection. Mais parfois, ce sont des TRAVAILLEURS d’élection, dont le job est bien différent et les motivations, plus ou moins éthiques!
J’ai passé des journées entières dans des bureaux de scrutin, soit à titre de candidat au municipal, soit à titre d’officier d’élection, au fédéral comme au provincial. Et j’ai vu des des vieillards impotents être embarqués comme du bétail au bureau de scrutin; on leur avait mis dans la main le nom du candidat pour lequel ils devaient voter… Ça, c’est de la fraude électorale!
À l’heure actuelle, ni les professionnels des soins de santé, ni les aidants naturels, ni le personnel qui assure les soins de longue durée ne disposent de balises leur permettant de déterminer si les personnes atteintes de démence qui devraient – ou non – pouvoir voter et, dans l’affirmative, quel type d’assistance pourrait être approprié. Le vote par les personnes atteintes de démence soulève une série de questions importantes quant à l’indépendance de leur vote, l’intégrité du processus électoral et la prévention de la fraude.
[…] Le droit de vote pourrait être retiré aux personnes qui deviennent incapables de voter. Cela s’applique plus particulièrement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, qui, à un certain stade de la maladie, deviennent légalement incapables. Une décision rendue en 2001 par la Cour Fédérale des États-Unis a pour la première fois défini avec clarté les critères qui permettraient de déterminer si une personne est apte à voter, en se basant sur sa capacité de faire un choix, de même que sur la qualité de sa capacité à comprendre la nature et la portée de l’exercice de son droit de vote.
Le présent article vise à analyser la capacité de personnes atteintes à voter sur la foi des critères établis par ce jugement. – University of Pensylvania Health System
L’article offre des liens vers divers documents, dont une étude de droit comparé (droit australien, droit allemand et droit canadien). Un lien – qui n’est malheureusement non fonctionnel, pointe vers une étude publiée dans le Journal of American Medical Association.
L’article de droit comparé risque d’en rebuter plus d’un. J’en retiens cet extrait, publié à la page 905:
Retenons que, par le passé, et comme le rappelle cette étude comparative, certaines dispositions destinées à restreindre l’exercice du droit de vote par les personnes dites incapables ont été jugées contraires à la Charte Canadienne des droits.
Faut-il pour autant baisser les bras et tolérer des agissements susceptibles d’être assimilés à fraude par des accompagnants à la solde d’un Parti ou d’une option (référendum)?
Non. Il s’agirait peut-être de légiférer afin de limiter l’exercice du droit d’accompagnement à des personnes qui seraient assermentées? Ou alors, que les personnes âgées ou handicapées au point de ne pouvoir voter sans assistance soient assistées conjointement par tous les représentants de tous les candidats. Évidemment, ça n’empêcherait pas les p’tits bouts de papier, mais la loi pourrait les interdire…
Et quand les officiers d’élection se déplacent vers les lieux où sont hébergés des personnes plus ou moins en mesure de comprendre ce qu’elles font, il est impératif que l’opinion des professionnels qui les entourent soit déterminante. Le Centre d’hébergement devrait d’ailleurs mettre au dossier de chaque personne hébergée un document signé de la main d’un professionnel (médecin, psychiatre ou même infirmière-chef), et la Loi devrait prévoir que l’opinion de ce professionnel lie les officiers d’élection.
Cela dit, la démence du dimanche n’est pas nécessairement aussi aiguë le lundi; dans le cas de ces patients, il devrait être laissé à la discrétion d’un professionnel de la santé mandaté pour ce faire de décider de l’aptitude du « patient » à voter et de l’assistance qu’il recevra.
Pour ma part, je serais favorable à une interdiction de cette pratique qui consiste à paqueter des vieillards dans un véhicule pour les amener voter, à moins d’une confirmation écrite de leur capacité à comprendre ce qu’ils font.
La notion de consentement libre et éclairé ne pourrait-elle pas s’appliquer au droit de vote?
Cela me semblerait souhaitable, applicable et acceptable.
Pour ce qui est de la pratique selon laquelle on remplit des autobus de personnes âgées que l’on amène voter en groupe elle me semble d’une éthique discutable et prêter flanc aux abus.
En 2002 (partielle) et 2003 (Élection générale), mon grand-père a voté pour madame Lise Thériault dans la circonscription de Anjou-Louis-Riel. Dans la chambre qu’il occupait alors au CHSLD on le voyait dans son fauteuil roulant enlacé par la souriante candidate…
Pourtant, dès 2001, cet octogénaire, jadis curieux et actif, souffrait de dégénérescence vasculaire ou si vous préférez de démence. En placement depuis 2001 et faisant l’objet d’un mandat d’inaptitude cet homme ne pouvait tout simplement consentir de manière libre et éclairée, non pas qu’il ne voulait pas, il ne pouvait pas.
Pourtant il a voté en 2002 et en 2003.
Je ne l’en blâme pas, mais je me questionne néanmoins un peu sur l’intégrité la candidate Thériault… Probablement aussi intègre que tous les candidats ayant participé à pareille mascarade.
Peut-être gagnerions-nous à revenir à la notion de « devoir » plutôt qu’à celle de droit de vote. Dans la mesure où se voir retirer un devoir heurte probablement moins que celle de devoir renoncer à un droit…
Pareil sujet est difficile mais ô combien important, merci d’en traîter.
@Objecteur Conscient
Votre proposition du consentement libre et éclairé est intéressante. Toutefois, un sytème faisant appel à cette notion (Comme par exemple la fromation des contrats) vient souvent avec la sanction de la fraude et du dol. Ainsi, reproduire intégralement un tel système au processus électoral voudrait dire une quasi certitude d’annulation d’élection pour vice de consentement en raison du dol.
Hors-sujet, mais j’en recommande la lecture: http://www.nousautres.org/de-beauceron-a-solidaire/